RECENSIONES
A. J. TURNER (1984-5)
The Time Museum. Catalogue of the Collection. vol I : Time Measuring Instruments, Part 1 : Astrolabes, Astrolabe Related Instruments; Part 3: Water-clocks, Sand-glasses, Fire-clocks. General Editor Bruce CHANDLER.
Rockford, Illinois, 268 p. + 183 p., ill.
The Time Museum à Rockford, Illinois, ouvert depuis 1970, s’est engagé dans un ambitieux projet, le plus ambitieux qu’on ait conçu depuis longtemps dans le domaine des instruments scientifiques: il s’agit du catalogage de la collection d’instruments de mesure du temps qui, rassemblée au fil des ans par Seth G. Atwood, compte plus de 3.000 pièces qui sont bien davantage qu’une simple accumulation d’objets.
Le but de la collection est d’illustrer le développement des instruments de mesure du temps de 3000 avant J.-C. jusqu’à nos jours. Elle ne comporte pas de reproductions sauf si, l’original n’étant pas disponible, l’instrument représente une étape majeure qui lui vaut d’être reproduit.
Le catalogue est divisé en 5 vol. et chaque vol. comprend plusieurs ouvrages dont chacun couvre un sujet bien déterminé. Le catalogue complet sera formé de 40 ouvrages qui ensemble traiteront de tous les aspects du calcul du temps. Les matières se répartissent comme suit: vol. I- Time Measuring Instruments; vol. II- Clocks; vol. III- Watches; vol. IV – Precision Timekeepers; vol. V – Horological Litterature. Au sein de ce plan général, chaque volume conservera son autonomie puisque, outre son exposé discursif, il comprendre ses propres bibliographie, glossaire et index. La rédaction du catalogue est assurée par 24 spécialistes internationaux sous la coordination de Bruce Chandler.
Le projet jouit de moyens typographiques et techniques remarquables: ces deux splendides volumes en sont le résultat. Le premier volume du catalogue et divisé en quatre parties: 1 – Astrolabes, Horizontal Instruments, Astrolabe Quadrants; 2 – Sundials, Nocturnals; 3 – Waterclocks, Sand-glasses, Fireclocks; 4 – Calendars, Astronomical and Other Instruments.
On trouve, dans la première partie une importante étude sur l’astrolabe planisphérique que pour une latitude particulière. Turner y expose les principes de la projection stéréographique et décrit les différentes parties de l’instrument ainsi que ses multiples usages y compris le repérage de l’heure.
Dans une optique historique, une section de l’ouvrage analyse l’origine, le développement et la diffusion de l’astrolabe 150 ans avant J.-C., date probable de la découverte de la projection stéréographique, jusqu’en 1300 en passant par les données théoriques exposées par Ptolémée (ca 100-ca 170) dans son Planisphaerium. Exemple de l’interrelation entre les sciences grecques et celles du moyen âge islamique, ce traité de Ptolémée, perdu dans sa version originale, a survécu dans sa traduction arabe établie pas Maslama al-Majriti (m.ca 397/1007) et traduite à son tour en latin par Hermannus Dalmatus (XIIème siècle). Turner cite plusieurs instruments qui, reposant sur la projection stéréographique, peuvent être légitimement considérés comme les ancêtres de l’astrolabe.
S’attachant alors à l’astrolabe lui-même, il en décrit les trois fonctions de base ainsi que celles qui s’y ajoutèrent au fil des siècles au fur et à mesure que s’élargissait la connaissance des potentialités de l’instrument. Ceci l’amène à étudier la littérature consacrée à l’astrolabe depuis le premier traité connu, celui de Théon d’Alexandrie (IVème siècle) jusqu’à ceux de Severus Sebokht (VIIème siècle) en syriaque, d’al-Fazari (m. ca 161/777), d’al-Farghani (m. après 247/861) et, pour l’Espagne musulmane, d’Ibn al-Saffar (m. ca 427/1035).
L’astrolabe occupe une place privilégiée dans l’histoire des sciences du moyen âge islamique. Turner divise son étude de l’astrolabe islamique selon des critères de répartition géographique: la Perse et le monde islamique oriental jusqu’en 1500; l’Espagne et le Maghreb; la Perse et l’Inde après 1500 forment trois sous-chapitres où sont soulignées les différences régionales dans la conception de l’instrument mais aussi les relations et les influences qui se sont exercées. Enfin il souligne le rôle de l’astrolabe dans la pratique de l’astrologie et l’établissement des horoscopes.
Turner évoque ensuite la transmission des connaissances relatives à l’astrolabe du monde islamique au moyen âge occidental à partir du XIème siècle et la place qu’occupa l’instrument dans la littérature latine jusqu’au XIIIème siècle. Le premier traité consacré à ce sujet est l’Opus praeclarissimi astrolabii; Practica astrolabii; De operationibus scale quadrantis in astrolabia scripte (Ferrare, 1475).
L’importance des ateliers de Gemma Frisius (1508-1555), Mercator (1512-1594) et Arsenius (XVIème siècle) en Flandre est soulignée.
Enfin, Turner analyse l’abandon de l’astrolabe, son déclin et sa mort à la naissance de l’astronomie moderne qui entraîna la disparition des fonctions scientifiques et sociales de l’instrument.
Le Catalogue contient la description de vingt-et-un astrolabes planisphériques, quinze d’origine orientale du Vème au XIXème siècle et six d’origine occidentale, du XIVème siècle au XXème siècle. Les caractéristiques régionales tant stylistiques que scientifiques sont mises en évidence.
Turner consacre un chapitre à l’astrolabe universel ou Saphaea Azarchelis dû à l’astronome hispano-musulman al-Zarqali (m. 494/1100) et à la lamina universalis de son compatriote Ali Ibn Khalaf Ibn Ahmar. Il s’agit certainement de la modification essentielle appotée à l’astrolabe au cours de sa longue histoire puisqu’elle résolvait les problèmes de manipulation créés par la nécessité d’employer plusieurs plaques de projection stéréographiques en fonction du changement de latitude.