1984 – 7(4)

L’Abbé Rousseau, de son vrai nom Henri de Montbazon (vers 1630-1696), qui fut désigné comme « le Capucin du Louvre » était un spécialiste de la fabrication des « remèdes secrets » et son livre comporte par exemple des recettes relatives:

– à l’utilisation des vipères : utilisation du foie et de la bile, préparation de l’essence de vipères (deuxième livre, pp. 34-35), propriétés de celle-ci, préparation du « vin de Raymond Lulle » (vers 1233-1315), célèbre hermétiste et mystique catalan, dont le fameux « vin » n’est autre qu’une eau de vie dans laquelle des vipères ont macéré;

– aux expériences remarquables sur le napel (chap. XII, p. 75 et ss.);

– à la préparation du Baume Tranquille que l’on rendait meilleur en y ajoutant de « gros crapaux vifs » (chap. X: pp. 129-134).

A plusieurs reprises, on trouve dans son livre des emprunts évidents à J.-B. Van Helmont, dont le nom est d’ailleurs souvent cité, que ce soit à propos de ses conceptions sur la nature des fermentations (Chap. VIII), des remèdes contenus dans les venins, ou des crapauds utilisés pour soigner la peste. Pourtant la source du texte qui était à l’origine des expériences de l’abbé Rousseau m’était inconnue et aucun des biographes ni des commentateurs – pourtant fort nombreux – de Van Helmont, n’avait fait allusion, à ma connaissance, à de telles expériences.

Toutes les allusions précédentes à « Vanhelmont » se rapportent bien au père, c’est-à-dire Jean-Baptiste Van Helmont (1578- 1644)[[ Van Helmont est né en 1578 et fut baptisé à Sainte-Gudule le 12 janvier 1579. On donne presque toujours 1577 comme date de naissance, d’après ce que Van Helmont avait lui-même écrit dans la préface de l’« Ortus Medicinae ». ]]et non à son fils cadet, François-Mercure (1614-1699), hermétiste rosicrucien et auteur de divers ouvrages ésotériques, mais où l’on ne parle pas de crapauds.

On pouvait croire que l’Abbé Rousseau s’était basé sur la traduction française des Œuvres de J.-B. Van Helmont, publiée par Jean Le Conte en 1671. Le passage recherché ne s’y trouvait pas, mais cette version française des Œuvres est unanimement considérée comme fort incomplète et même médiocre. J’ai pensé que la source pouvait se trouver dans ces fameux écrits sur le magnétisme animal qui entrainèrent la condamnation de Van Helmont par le clergé de Malines. Le principal écrit fut publié, à son insu, en 1621. Le passage recherché ne s’y trouvait pas, de même d’ailleurs que dans la version anglaise commentée de ce texte, parue en 1650 (Van Helmont, 1621, 1650). Par contre il en est question mais sous forme d’une allusion plutôt dans un texte qui était resté inédit et qui ne fut publié qu’en 1869 par les soins de C. Broeckx, le grand historien de la médecine belge:

« Rana nunque exiccata cum anthraci apposita, virus pestis exigat; oculi idcirco ut maxime ignei quandiu vivunt, ita periapti vice tractivi magis quam tota rana tabemque febris, eo potentius trahent. Ac quidem statis horis, id est ante solis ortum eruti: eo quod magis scintillent, quorum lumen clariore oborto mox dispergitur, cantusque cessat. Quin lumen clariore oborto mox dispergitur, cantusque cessat. Quin etiam rana, noctu coaxando lassata, atque oculis nil tale propter vocem laborantibus (hi nanque, spiritu animali vegeti sunt, propter follium seu bullarum, utriusque ad buccas inter cantandum, tumefactionem) id cireo ante solis adventum, vivis ranis eximendi sunt, duracetque scilicet tamdiu magnetica attractio, quandiu exicatta rana superesset. Igitur in aquam dimittuntur quo linguis vivunt, totumque febrile supponis, dubia saltem reliquantur deinceps, cum rationum adhunc in natura inveniant. »

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