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Les disciplines auxiliaires de l’histoire de la technologie

C’est sur la distinction entre sources écrites et non-écrites que repose la définition de l’archéologie : recherche, étude, description et si possible conservation des sources non-écrites de l’histoire, sans considération des aspects esthétiques, étrangers en principe à cette discipline. La périodisation de l’histoire [11]
conduit naturellement à distinguer l’archéologie préhistorique, l’archéologie classique (gréco-romaine), l’archéologie médiévale, l’archéologie moderne, l’archéologie industrielle et l’archéologie contemporaine [12].

Il est donc parfaitement clair que l’histoire des techniques est universelle dans le temps et dans l’espace et qu’il s’agit d’une science à finalité propre, alors que l’archéologie industrielle est une discipline subordonnée à l’histoire des techniques (mais aussi aux autres histoires : générale, sociale, économique ...) et qui ne concerne qu’une époque, entre la Révolution industrielle et la Révolution informatique.

Il est non moins clair que l’archéologie industrielle ne concerne pas exclusivement l’industrie, mais que l’épithète qui qualifie cette discipline indique un moment de l’histoire (environ deux siècles) caractérisé par l’industrialisation. C’est pourquoi une selle de cowboy, la tunique d’un portier d’hôtel de 1900, les affiches de Cassandre, un fauteuil de 1925, relèvent de l’archéologie industrielle autant qu’une machine à vapeur ou un châssis à molettes.

Il est clair encore que l’histoire des techniques ne demande pas l’aide uniquement de l’archéologie industrielle. Les galets aménagés
pré-acheuléens intéressent l’historien des techniques, de même que les poids et mesures de l’Empire Romain, ou que les canons de François 1er.

Références

J. M. Auzias, 1964. - La philosophie et les techniques. PUF, Paris, 119 p.

J. C. Baudet, 1979. - Note sur le statut épistémologique de l’archéologie industrielle. Technologia 2(1) : 9-17.

M. Daumas (sous la direction de), 1962 à 1979. - Histoire générale des techniques. PUF, Paris, 5 vol.

S. de Beauvoir, 1944. - Pyrrhus et Cinéas. Gallimard, Paris, p. 18.

M. Fichant, 1969. - L’idée d’une histoire des sciences in M. Fichant & M. Pécheux, Sur l’histoire des sciences. F. Maspero, Paris, 172 p., p. 51 à 169.

J. Gaston, 1972. - Secret et compétition chez les chercheurs. La Recherche n° 26 : 717-22.

B. Gille (sous la direction de), 1978. - Histoire des techniques. Encyclopédie de la Pléiade, Gallimard, Paris, XIV + 1652 p.

J. B. Quintyn, 1979. - Sociaal economische eigenheid van de techniek. Sartonia 45 : 20-7.

J. Rostand, 1954. - Pensées d’un biologiste. Stock, Paris, p. 101.

B. Saint-Sernin, 1976. - Paradoxes technologiques des sociétés modernes. Et. Philos. (1976) : 197-207.

S. Tovmassian, 1976. - Problèmes philosophiques du travail et de la technique.
Ed. du Progrès, Moscou, 286 p.

[1 prodrome d’une notice qui paraîtra dans la Biographie nationale de Belgique (NDLR).

[2 Lire, sur la question de l’urgence de publier, l’article de Gaston (1972) dans La Recherche.

[3 Les techniques sont des modes d’appropriation du monde : le ciel est à qui sait voler (de Beauvoir, 1944.)

[4 Les questions de vocabulaire se compliquent encore (à moins qu’elles ne s’éclaircissent) quand on prend en considération les usages anglo-saxons. Il est indéniable que l’usage actuel, en français,
du mot technologie vient partiellement d’une contamination par l’anglais (Saint-Sernin, 1976).

[5 C’est la définition de l’homme que l’on trouve chez Jean Rostand (1954), qui précise : petit-fils de poisson, arrière-neveu de limace, bête saugrenue qui devait inventer le calcul intégral et rêver de justice.

[6 L’expression se trouve chez Bachelard, et s’adresse plutôt à la science. C’est que le mot appliqué n’est pas, dans l’épistémologie de l’Ecole française, utilisé dans sa pleine acception.

[7 Désirs. Ce mot, qu’il est impossible de ne pas rapprocher du mot péché, nous éclaire sur la suspicion ou le mépris qui s’attachent à la technique dans certaines cultures. Voir Tovmassian, 1976,
qui analyse l’attitude « idéaliste-bourgeoise » face au travail, sans aller à l’essentiel, étant prisonnier d’un système de pensée qui n’incite guère à la réflexion personnelle ; voir aussi Auzias, 1964, plus
subtil.

[8Et autres spécialistes de formation à dominante juridique et littéraire : sociologues, économistes.

[9 Quand il existe. Il n’y en a pas, nous l’avons déjà dit, du moins de jure (c’est-à-dire avec grade et diplôme) en Belgique. D’autres pays, où le nombre d’établissements de niveau
universitaire par km² est moins élevé que chez nous, en produisent d’excellents. L’hybridation est délicate. Je ne sais plus qui disait que la médiocrité de la science des philosophes n’a
d’égale que l’inanité de la philosophie des savants. Un autre disait que l’historien des techniques parle d’histoire avec les techniciens et de technologie avec les historiens, ce qui est fort
confortable.

[10 Il faudrait étudier l’association d’idées « technologie-machine », qui révèle une conception singulièrement rétrécie (et erronée) de la technologie.

[11 Il faut aussi prendre en considération les territoires : archéologie américaine pré-colombienne, extrême-orientale, etc. Cela a son importance pour l’archéologie industrielle : est-ce uniquement de l’Occident qu’il s’agit ?

[12 Pour la position épistémologique de l’archéologie industrielle et de l’archéologie contemporaine, nous nous permettons de renvoyer à notre article : Baudet, 1979.

[13 Pendant plus de 11 ans, j’ai exercé la fonction de dessinateur d’études à ladite société ; j’y étais également délégué syndical et membre de la commission de sécurité et d’hygiène.

[14Cet historique complètera les travaux déjà publiés sur les laminoirs de la région :
Hansotte, 1955 ; Hansotte et Hennau, 1979.

[15Hier moet onderstreept worden, dat Prof. ir. Quintyn de uitgever is van het tijdschrift Sartonia, gewijd aan de geschiedenis van de wetenschap en techniek. Sartonia en Technologia zijn de enige Belgische tijdschriften die zich met deze discipline inlaten.



















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