1987 – 10(2/3/4)

Pour revenir au diamètre de la roue, il a été adapté également au nombre de compressions à la minute du soufflet nécessaires pour l’entretien suffisant du foyer de la forge. La vitesse de rotation des roues étant liée à la vitesse de la marche du chien et à la circonférence de la roue, donc à son diamètre, les cloutiers s’arrangeaient pour obtenir environ quinze tours à la minute, c’est-à-dire un soufflage toutes les quatres secondes, vitesse compatible avec les caractéristiques des soufflets.

En ce qui concerne les couteliers il semble qu’ils ont surtout utilisé les roues à chien pour faire tourner leurs meules. La vitesse de rotation relativement élevée de celles-ci, de quatre cents tours à la minute, par exemple, ne permettant pas une utilisation directe de la force motrice canine, il fallait passer par l’intermédiaire d’un multiplicateur de vitesse à deux poulies. Pour ce faire la meule était munie d’une roue d’entraînement d’un diamètre réduit liée par une courroie de transmission à une poulie de grand diamètre, liée directement ou par l’intermédiaire d’un autre ensemble de deux poulies à la roue motrie. De ce fait le diamètre de cette dernière roue pouvait être plus grand, d’autant plus que les dessins qui nous montrent les émouleurs au travail à Mandres et à Châtellerault témoignent de l’existence effective d’une double transmission, la meule étant entraînées par une poulie fixée sur un arbre intermédiaire libre.

Double transmission également dans le cas de cet atelier de clouterie reconstitué au Musée de l’Ardenne à charleville-Mézières. En effet, là aussi on a cherché à obtenir une vitesse de rotation assez élevée car, s’agissant d’un atelier datant probablement des débuts du 20e siècle le soufflet de la forge a été remplacé par un ventilateur qui ne débite convenablement que s’il tourne vite.

On peut noter en passant que ces ventilateurs, connus des métallurgistes, allaient être équipés avec des moteurs électriques pour remplacer progressivement les soufflets plus encombrants et moins faciles à mettre en œuvre.

Conséquence, plus ou moins directe, de l’accroissement du diamètre de la jante une augmentation du nombre de rayons de la roue passant de quatre à six. Corrélativement on assiste à une modification du mode de réalisation de la roue qui, par exemple, dans le cas des ateliers de Mandres de Sarcey et de Millières s’approche de la structure des roues des bicyclettes. Cette dernière modification permet, en particulier, de ramener la fixation de la jante d’un seul côté d’un moyeu, qui remplace l’axe, le chien pouvant ainsi accéder plus facilement à l’intérieur de la roue et d’y évoluer plus aisément.

En outre les roues de Sarcey et de Millières comportent un mécanisme de multiplication de vitesse à engrenages couplé directement à l’axe de la roue, et transmettant son mouvement à une roue d’entraînement de la meule liée par une courroie à cette dernière; mécanisme qui simplifie l’installation en supprimant l’arbre auxiliaire.

A quelques exceptions près, le coutelier ne se sert pas de la roue à chien pour faire actionner le soufflet de sa forge. Le foyer de celle-ci doit être avivé par intermittence, ce qui est plus facile à obtenir d’un homme que d’un animal. Pourtant dans Le tour de la France par deux enfants de G. Bruno (épouse du philosophe Alfred Fouillée, maître de conférence à l’Ecole normale supérieure), ouvrage paru en 1877, on trouve, une gravure représentant l’atelier d’un cloutier de Thiers où l’on voit, en particulier, un chien dans une roue qui actionne … un soufflet de forge (?). La seule explication que l’on puisse avancer concernant la réalité d’un atelier thiernois ayant pu servir de modèle au dessinateur, est une transposition « géographique » entre la Haute-Marne et Ie Puy-de-Dôme. Le saura-t-on jamais. En effet, on ne trouve nulle trace de roue à chien dans la région de Thiers où, il est vrai, la roue hydraulique semble avoir existé dès l’origine.

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