1986 – 9(1)vervolg

HISTOIRE ORALE ET MILIEU SOCIAL

Jean PUISSANT
Docteur en Histoire
Professeur à l’Université Libre de Bruxelles

Samenvatting

Mondelinge geschiedenis en sociaal milieu.

« Meer dan een werktuig, minder dan een wetenschapstak »: de mondelinge geschiedenis heeft sedert een tiental jaren haar sporen verdiend. Ze biedt tegelijk bronnen en nieuwe methodes op diverse gebieden van het geschiedkundig onderzoek. Haar toepassing op de industriële archeologie kan ons veel nuttigs leren, dat echter getoetst moet worden aan de kennis die langs andere wegen wordt opgedaan. De toepassingen op dit gebied lijken nog zeldzaam, maar sommige onder hen laten reeds toe al het nut in te zien dat men er kan uithalen.

L’oralité: une découverte?

L’enquête orale n’est ni nouvelle ni nécessairement innovatrice si l’on pense aux recherches musicales du début du siècle (Bartok, par exemple), aux domaines du folklore, de l’ethnologie et, bien évidemment, du journalisme. D’un point de vue plus systématique et comparable aux courants actuels, des recherches ont été menées avant la Seconde Guerre en Pologne (milieux paysans) et aux Etats-Unis (chômeurs de la grande dépression). Mais c’est surtout depuis une vingtaine d’années que sociologues (récits de vie) et historiens (histoire et traditions orales) mais aussi écrivains et journalistes (vogue des récits autobiographique rédigés ou enregistrés puis réécrits) ont remis à la mode l’enquête orale [[Par exemple, et pour se limiter au domaine français:

E. Carles, Une soupe aux herbes sauvages, s.l., 1977; A. Sylvère, Toinou, le cri d’un enfant auvergnat, Paris, 1980 réécrit par J. Malourie. Dans un autre registre, M. Gray, Au nom de tous les miens, Paris, 1971 réécrit par Max Gallo ou P.J. Helias, Le Cheval d’orgueil, mémoires d’un Breton du pays bigouden, Paris, 1975. ]].

Cette fois la procédure a été analysée, critiquée, systématisée et a donné naissance à des théories, des méthodes et des pratiques multiples, souvent novatrices [[cf. l’excellente introduction à la problématique de l’histoire orale de J.P. Rioux, Histoire orale: essor, problèmes et enjeux, dans Cahiers de Clio, 75-76, 1983, pp. 29-48, parue dans un numéro thématique consacré à l’histoire orale appliquée à l’enseignement; R. Thompson, Historiens et histoire orale dans Mémoires collectives. Actes du Colloque d’octobre 1982, Bruxelles, 1984 pp. 281-295. Voir aussi l’exposé systématique de J. Poirier, S. Clapier-Valladon, P. Raybaut, Les récits de vie. Théorie et Pratique, Paris, 1983 ainsi que H. Gaus, B. De Graeve, F. Simon, A. Verbruggen-Aelterman, Alledaagsheid en mondelinge geschiedenis, Gent, 1983. ]]. Une procédure d’institutionnalisation s’est mise progressivement en place notamment dans le cadre de congrès internationaux d’histoire orale. Le cinquième vient de se tenir au printemps dernier à Barcelone sur le thème El Poder a la societat. En Angleterre, un pionnier en la matière, P. Thompson, anime une revue: Oral History.

La tendance majeure dans un premier temps a été d’écouter la parole de ceux qui étaient dépourvus d’expression écrite ou de restituer la parole à ceux qui en étaient dépossédés en raison de la situation politique, économique, sociale ou culturelle. C’est dans ce sens que travaillait notre compatriote J. Van Sina (1961) dans la région des grands lacs d’Afrique Centrale; dans ce sens aussi, O. Léwis (1961) à l’écoute d’une famille mexicaine et, après eux, la plupart des travaux parus depuis. Il s’agissait de rechercher « la mémoire collective » l’expérience, la vie des groupes sociaux, culturels, nationaux dominés, des colonisés, d’étendre cette recherche aux ouvriers en général, aux femmes, aux « Bretons » (pour donner un exemple précis), en privilégiant le marginal par rapport au dominant, le quartier par rapport au centre, la campagne par rapport à la ville, l’individu par rapport au collectif ou à l’institution.

Mai 1968: l’agitation des campus américains, celle de Berlin ne sont évidemment pas loin. C’est le retour en force de l’acteur, selon l’expression d’Alain Touraine.

L’essentiel des travaux a été poursuivi dans ce sens. Mais cette orientation peut cette fois s’expliquer d’un point de vue idéologique, au sens large du terme; d’un point de vue méthodoloqique, rien, bien sûr, ne s’oppose à investiguer dans d’autres milieux sociaux. On partait de l’idée, fondée mais non généralisable, que les « dominants » qui détiennent les techniques d’expression ne se faisaient pas faute de les utiliser. Mémoires d’aristocrates, d’hommes politiques, d’écrivains sont effectivement nombreuses mais peut-être pas autant que ne l’espéraient les chercheurs, et trop souvent il s’agissait soit d’ouvrages considérés comme trop individuels soit reflétant trop l’actualité vécue, saississables par d’autres sources.

Par contre, dans certains milieux appartenant aux classes supérieures, l’habitude de se raconter ou de communiquer ses expériences est loin d’être courante. Le milieu des financiers, des dirigeants d’entreprises, des ingénieurs n’est apparemment pas très prolixe. L’exemple récent de R. Martin (1984) ingénieur des mines et grand patron, est là pour souligner à la fois la rareté de ce type de produit et l’intérêt qu’il y aurait à le voir se multiplier éventuellement sous forme de récits de vie ou d’hitoire orale. Dans le domaine de l’archéologie industrielle, de l’histoire des entreprises et des entrepreneurs, de l’histoire des techniques, les méthodes de l’enquête orale peuvent porter leurs fruits, que ce soit dans la perspective ouvrière, du personnel d’encadrement ou de direction.

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