1986 – 9(1)suite

Le classement comme monument existe également. C’est le cas:

– pour les forges, le pont-barrage, le four à chaux et les ruines à Léglise (ancienne commune de Mellier) [[ Arrêté du 13 octobre 1980.]],

– pour les façades et la toiture du phalanstère, la tour n° 1, la salle des machines du charbonnage du Hasard à Visé (ancienne commune de Cheratte) [[Arrêté du 30 juin 1982. ]], avec en sus un classement comme site pour la cite-jardin et le charbonnage,

– pour le pont levant et l’écluse du canal de l’Ourthe à Liège (ancienne commune d’Angleur)[[Arrêté du 20 mai 1983. ]].

La distinction dans la procédure de classement entre monument et site ne relève pas seulement du vocabulaire. Outre une protection moins générale, mais qui peut être plus précise, le classement comme site offre une particularité: dans ce cas, aucun droit à une intervention pécuniaire publique n’est prévue pour des travaux de restauration, à la différence de ce qui se fait pour les monuments, dans des proportions qui varient entre 60 et 95 % pour la seule Communauté française, selon l’intérêt du bâtiment et la nature du propriétaire.

Deux autres remarques importantes s’imposent encore. Dans leur quasi totalité, ces classements de patrimoine industriel sont récents et ont rarement plus de dix ans. C’est le signe d’une prise de conscience assez neuve et qui paraît coïncider avec le déclenchement d’une récession économique qui se greffe en Wallonie sur une crise structurelle des industries traditionnelles. En outre, des lacunes étonnantes sont manifestes. Deux des joyaux de l’archéologie industrielle en Wallonie ne sont pas classés: Le Grand-Hornu à Boussu (ancienne commune d’Hornu), le quartier de Bois-du-Luc à La Louvière (ancienne commune d’Houdeng-Aimeries), dont le sauvetage, fort heureusement, est assuré par d’autres voies. C’est le résultat d’une politique qui est restée par trop sporadique, beaucoup plus que pour les bâtiments traditionnellement plus prestigieux (églises, châteaux).

Ce qui précède constitue sans nul doute le cœur de la défense du patrimoine industriel pour ce qui est de l’action des pouvoirs publics (en y ajoutant le rachat et la réaffectation en centre culturel et en musée de la sucrerie de Waterloo par la Communauté française).

Une autre façon de préserver le patrimoine, et qui en est souvent même la condition sine qua non si l’on veut arriver à une politique globale, c’est d’établir un inventaire de ce qui est à sauvegarder. Dans cette optique, le Ministère de la Communauté française a confié aux Archives d’architecture moderne le soin de procéder à l’Inventaire du Patrimoine industriel de Bruxelles (19 communes) (qui est terminé mais pas encore publié).

D’autres actions sont menées: différents musées sont subsidiés:
Musée de la pierre à Antoing, Musée du verre à Charleroi, Musée de la mine et Musée du clou à Fontaine-l’Evêque, Musée du fer et du charbon à Liège, Musée du papier à Malmédy, Musée du marbre à Rance, Musée du fer, archéologie industrielle, métallurgie ancienne à Saint-Hubert, Musée de la pierre à Sprimont, Musée du coticule à Vielsalm, Musée de la laine à Verviers. Deux musées de machines agricoles sont en préparation, signes d’un intérêt nouveau.

On touche ici à la protection du patrimoine mobilier, à coup sûr bien plus mal assurée que celle du patrimoine immobilier. La législation en la matière est plus succincte encore. Elle se limite aux articles 17 à 20 de la loi du 7 août 1931 qui prévoient un inventaire des objets mobiliers appartenant aux différents pouvoirs publics ainsi que leur protection. C’est dire que toute liberté est ainsi accordée aux particuliers et aux responsables de sociétés négligents d’envoyer à la casse les témoins d’une activité peut-être révolue mais qui eut sa grandeur et conserve une valeur historique et un intérêt pour le présent.

La restauration du patrimoine mobilier est un fait rare mais réel. Ainsi la Communauté française a racheté et restauré les vitraux d’Anto Carte de l’ancien charbonnage d’Hensies-Pommerœul et les a confiés à la Faculté Polytechnique de Mons.

Enfin, d’une manière générale, une activité de soutien et de propagande s’exerce par l’aide apportée à l’A.S.B.L « Patrimoine Industriel Wallonie-Bruxelles » qui coordonne depuis 1984 les efforts de nombreux groupements qui s’intéressent à l’archéologie industrielle et qui parfois ont entrepris la sauvegarde d’un site, d’une industrie en reprenant dans un but culturel et touristique un charbonnage, une ligne de chemin de fer, un canal, etc …

Je parlais plus haut de l’intérêt pour le présent de ces préoccupations apparemment archéologiques et historiques. Cet aspect du problème me paraît fondamental. La Communauté française a le souci de redonner confiance à des régions dont les habitants ont perdu le souvenir de grandes réussites scientifiques, techniques et industrielles d’autrefois.

La défense du patrimoine industriel, c’est aussi la manifestation d’une volonté de retrouver l’énergie et les succès d’antan [[Cet article doit beaucoup à celui qui a été publié par Mme Ghislaine De Bièvre, Directeur de l’Administration du Patrimoine culturel dans le n° 1 (4ème trimestre 1984) de Patrimoine Industriel (Bulletin trimestriel de l’A.S.B.L. « Patrimoine industriel Wallonie-Bruxelles ») pp 8-9, sous le titre « Activités de la Communauté française en matière d’archéologie industrielle ».]].

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