1984 – 7(2)

1.- L’histoire de la formation des ingénieurs en Belgique

Le passé des ingénieurs en Belgique, évidemment très riche dans un pays qui fut en fait le deuxième pays à s’industrialiser, après l’Angleterre, c’est une bien longue histoire. Nous nous limiterons à retracer, d’ailleurs sommairement, l’histoire de la formation, c’est-à-dire l’histoire des Ecoles et du cadre législatif.


Au moment, après Waterloo, de la formation du Royaume des Pays-Bas par réunion de la Belgique et de la Hollande, la réorganisation de l’instruction publique est, évidemment, une des principales préoccupations du nouveau gouvernement. En ce qui concerne l’enseignement supérieur, il avait le choix entre le système des facultés isolées de l’Université de France et le système des universités de l’Ancien Régime. On pense bien qu’il n’hésita guère. Le rétablissement des universités de Leyde, de Groningue et d’Utrecht est décrété en 1815, par arrêté royal du 2 août. Mais la Belgique n’avait possédé qu’une seule université, à Louvain, supprimée, pendant le régime français, par arrêté du 4 brumaire an VI (25 octobre 1797) de l’Administration centrale du département de la Dyle. Suffisait-il de la rétablir? Un décret (1815-09-15) ordonne la création d’une ou plusieurs universités dans les provinces belges du royaume: le gouvernement, toujours hésitant sur le nombre d’institutions à créer, désigne une commission pour rédiger un projet d’organisation de l’enseignement supérieur dans les provinces méridionales. La commission (1815-11-08) propose trois universités, à Gand, à Liège et… à Louvain.

Il résulte, des travaux de la commission, un arrêté organique de l’enseignement dans les provinces méridionales (1816-09-25) qui sera confirmé par décret royal (1816-09-28) approuvant le projet de trois universités.

Celles-ci entameront leur carrière dès 1817, formées sur le modèle d’Ancien Régime (remontant au moyen âge, nous sommes en pleine période romantique) : une Faculté de Philosophie et Lettres (le trivium) à laquelle est adjointe une Faculté de Droit, une Faculté des Sciences (le quadrivium) à laquelle est adjointe une Faculté de Médecine. Le litige et la maladie sont les deux grands soucis de la bourgeoisie triomphante de la Restauration. Il faut donc des Avocats et des Médecins. Se parant du prestige des temps anciens (notamment par l’utilisation du latin comme langue d’enseignement et par la mise en place d’un décorum fort élaboré), ces universités de nouveaux riches se présenteront volontiers comme consacrées à la science « pure » et vouées uniquement aux travaux de l’esprit, méprisant superbement les préoccupations « utilitaires ». Les discours académiques les plus pompeux, pendant cent cinquante ans, véhiculeront cette idée hypocrite[[L’hypocrisie, on le sait, est la grande vertu bourgeoise. ]], à moins qu’elle ne fût naïve, que l’enseignement de niveau universitaire vise uniquement les joies indicibles que procurent les travaux de l’esprit, sans souci utilitariste, alors que son organisation n’a pour seul but que de former aux bien utiles professions juridiques et médicales! Il faudra attendre le printemps de 1968 pour que cette prétention soit contestée. L’on sait qu’il suffira que les étudiants contestataires soient nommés maîtres de conférences et chargés de cours dans les institutions contestées pour que cessât la contestation …


Fig. 1 – Fac-similé de la première page (13,5 X 21 cm) du bulletin de l’Association des Ingénieurs de Liège, qui semble être le premier périodique émanant en Belgique d’une association d’ingénieurs. La première livraison de ce bulletin, qui comporte 68 pages, reproduit notamment les sommamires de diverses revues. Trois publications belges sont ainsi signalées: la Revue universelle, les Annales des Travaux publics de Belgique et le Bulletin du Musée de l’Industrie. En outre, sont mentionnés 5 périodiques français, 3 anglais et 3 allemands.

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