1989 – 12(1)


Transcription des cylindres

Sur les sept cylindres conservés, nous en avons décodé et transcrit trois, à savoir la paire de cylindres intitulée « Componium-Improvisation » et le cylindre contenant l’Ouverture de la Flûte Enchantée de Mozart. Grâce au damier qui figure sur la surface des cylindres, nous avons reproduit tout le notage sur des rames de papier millimétré de grand format (45 cm x 65 cm). Douze rames ont été nécessaires pour le décodage de la paire de cylindres improvisateurs; 18 pour l’Ouverture de la Flûte Enchantée. A partir de ces documents – que nous nommons échelles de décodage -, s’effectue l’opération de transcription en notation ususelle. Ces travaux requièrent, on s’en doute, un temps considérable (environ 380 heures pour un cylindre). Depuis lors, nous avons développé à l’UCL un programme de recherche sur le décodage et la transcription automatique des cylindres par ordinateur. Le système comprend un lecteur universel de cylindres comportant quatre-vingt touches à micro-contacteur. Chaque touche est réglable en espacement et en hauteur, de manière à s’adapter à toutes les tailles de cylindres. Une fois le cylindre placé sur le lecteur universel et les touches à micro-contacteur convenablement ajustées, une rotation lente du cylindre est assurée par un moteur doté d’un variateur mécanique de vitesse à double anneau de friction, avec un système d’accouplement élastique Holset. L’état du lecteur universel est scruté périodiquement et tout changement se traduit par l’envoi vers le calculateur du numéro de la touche actionnée avec une indication de temps (digital-in digital-out). Le premier document produit par l’ordinateur est une « échelle de décodage » qui présente la musique dans un graphisme composé de points et de traits de longueur variable, correspondant aux pointes et aux ponts qui garnissent la surface du cylindre. Des programmes de transcription restituent ensuite à chaque point et à chaque trait de l’échelle sa valeur symbolique en note écrite sur la partition. Notre étude sur le Componium contient 76 pages de transcriptions musicales par ordinateur. La mise en page des différents segments musicaux permet au lecteur de simuler le fonctionnement « aléatoire » du Componium.

En examinant les transcriptions musicales, on s’aperçoit que le noteur a utilisé une marche, ainsi que sept variations de cette marche. Il a ensuite segmenté cette marche et ses sept variations en cellules musicales de deux mesures. La mécanique se charge de permuter ces cellules, grâce au déplacement latéral des cylindres, amenant ainsi des variations toujours nouvelles. Bien entendu, la progression harmonique de la marche et de ses sept variations est constante.

Simulation sonore

Le Componium de Winkel est aujourd’hui réduit au silence. Plus personne ne songe au privilège d’une audition spéciale, car l’orgue ne fait entendre que des lambeaux de mélodie, un son par-ci, un son par-là, sur des tuyaux désaccordés. Quelques touches grippées, ainsi que des soupapes bloquées font rugir l’instrument dès que l’on actionne la soufflerie. Par ailleurs, les cylindres ont énormément souffert de l’humidité, au cours des temps. Quelques années seulement après sa construction, le Componium perdit à jamais les traits de son éloquence musicale, suite à une saisie judiciaire et à l’entreposage dans des caves humides. On comprend que le moindre gauchissement des cylindres provoqué par l’humidité, altère de manière directement perceptible le programme musical.

L’informatique musicale est venue au secours de cette désolente infirmité. Nous avons pu proposer une simulation du jeu du Componium, lors d’une communication aux IIIe Congrès de l’Association des Cercles Francophones d’Histoire et d’Archéologie de Belgique, à Namur, en août 1988.

Nous avons réalisé cette synthèse sonore à partir des transcriptions que nous avions faites. Le Jeu Componium est simulé par un ordinateur musical YAMAHA MSX128. Le son que nous proposions s’approchait du son émis par les tuyaux du Componium lui-même. L’ensemble du répertoire de la paire de cylindres intitulée « Componium-Improvisation » a fait l’objet d’une reconstitution sonore, de sorte qu’il nous est possible de donner à entendre une infinité de Marches, ainsi que le fait le Componium. Un échantillon de cette reconstitution sera proposé prochainement aux visiteurs du Musée Instrumental de Bruxelles, dans la salle réservée aux instruments de musique automatiques.

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